cerveau


Anne-Lise POLO

Neurothérapeute


Anne-Lise Polo, PhD., chercheure en sciences humaines spécialisée sur les rapports identité-altérité, a enseigné l'histoire et la science politique dans différentes universités du Québec.

Auteur de La Nef marrane, et d'articles de philosophie, elle a orienté ses recherches dans le domaine de la réduction du handicap suite à la naissance de sa fille en 2002 atteinte de paralysie cérébrale grave. Elle travaille comme neurothérapeute depuis 2005.





Articles

Article 1
Comprendre l’apport des thérapies neurologiques dans le développement cérébral et la réduction du handicap.

Article 2
Tout se joue avant trois ans, ou comment soutenir le développement cérébral des enfants.

Article 3
Un cerveau plein d’énergie…

Article 4
La médecine occidentale moderne face aux nouveaux paradygmes

Article 5
Médecine intégrative, entretien avec Anne-Lise Polo, neurothérapeute.





Article 3

Un cerveau plein d’énergie…
Séminaire Okima, Annecy 11 mai 2019

Par Anne-Lise Polo

Introduction

Lorsque Lucie est née en novembre 2002, rien ne laissait supposer que je m’intéresserais un jour aux neurosciences, ni que je deviendrai neurothérapeute, profession qui, d’ailleurs, n’existe pas.

Le texte qui suit reprend une analyse présentée le 11 mai 2019 à Annecy dans le cadre des samedi Okima1. Il présente les résultats d’une réflexion que je mène depuis maintenant 16 ans et demi et qui est le fruit de la rencontre surtout, mais pas seulement, de deux cerveaux, celui de ma fille Lucie détruit pendant l’accouchement et le mien, construit méticuleusement pendant plusieurs décennies et dont je peux dire aujourd’hui avec le recul et les connaissances qui sont les miennes, qu’il est très fonctionnel, en tous cas selon les normes en vigueur dans notre société. Il est le résultat d’une éducation « réussie ». Je n’en tire aucune vanité personnelle, je suis très reconnaissante à ceux qui m’ont éduquée de m’avoir « fabriquée » comme je suis.

Mon cerveau est le résultat d’un parcours et ma réflexion en est le fruit de recherches menées depuis presque 30 ans. Pour comprendre ce que je pense, il est nécessaire aussi brièvement que possible de revenir sur le parcours.

J’ai connu une enfance heureuse et épanouie dans un milieu privilégié. Quatrième d’une fratrie de cinq, j’ai eu à batailler pour prendre ma place. Je n’ai jamais été considérée comme une enfant brillante ni même particulièrement douée, ma soeur aînée était la surdouée intellectuelle de la famille, la seconde était la surdouée en sport, la troisième était la plus jolie, quant à mon frère, c’était le plus jeune et le seul garçon. Je crois que tout ce qu’on peut dire de moi quand j’étais enfant, c’est que j’étais la plus bavarde et que je passais mon temps à raconter des histoires, assise sur le buffet du salon et que je riais beaucoup (ma mère raconte que je suis née en riant). J’aimais l’école qui m’aimait en retour. Là encore, je n’étais pas toujours première de classe, j’ai disputé cette place durant tout le primaire à une autre petite fille et au secondaire, la concurrence des garçons est devenue redoutable. J’ai donc grandi dans une atmosphère stimulante qui a forgé mon caractère. J’ai fait différents sports, beaucoup de danse et d’équitation, du piano, du dessin, du tricot, de la couture, de la pâtisserie et j’en passe. J’ai toujours réussi tout ce que je voulais, non pas tant parce que j’étais une enfant gâtée par la vie, que parce que j’étais incroyablement persévérante. Bref, j’étais bonne en tout, sans exceller nulle part.

Par le biais de l’allemand, du latin et des mathématiques, j’ai suivi un parcours d’excellence qui m’a conduite à 18 ans en classe de maths sup bio au lycée Henri IV. C’est à ce moment-là qu’a eu lieu ma première prise de conscience. Je réalise que la voie toute tracée que je suis depuis l’enfance et sans me poser de question, est celle que la société a déterminée pour moi. Ce brutal sursaut de la conscience me fait sortir de l’enfance. J’abandonne maths-sup.

Après une année d’errance, je réalise que mon plus grand souhait est d’écrire. Je songe alors à devenir journaliste et je m’inscris en fac d’histoire à Jussieu, une fac « marxiste ». C’est ma deuxième prise de conscience. J’y découvre avec stupeur l’autre face du monde et perd ma naïveté de jeune bourgeoise bien élevée. Le barbare n’est pas hors de nous, il est en nous. Je deviens l’une des égéries du mouvement étudiant de 1987, me mets à lire le Monde, Libé, le canard enchainé, le monde diplomatique. Après la licence, je fais une maitrise sous la direction d’Elias Sanbar, l’un des plus éminents intellectuels palestiniens de l’époque, et deviens une spécialiste de la « question palestinienne ».

L’année suivante, je quitte Paris pour Tunis où j’apprends l’Arabe classique et effectue des recherches sur la politique américaine au Proche-Orient sous la direction d’un professeur de la fondation nationale de science politique de Paris. Je lis beaucoup et découvre l’étonnant ouvrage d’un professeur de science politique de Montréal, Thierry Hentsch, L’Orient imaginaire (1988). Je me mets en contact avec lui, il accepte de diriger ma thèse et je m’installe à Montréal l’année suivante au grand dam de mon professeur de science po Paris.

Les années de mon doctorat sont extraordinairement enrichissantes du point de vue intellectuel. Quelque chose qui était en germe s’épanouit. J’enseigne les relations internationales au Proche-Orient et l’histoire de la civilisation musulmane, je participe à différents groupes de recherche, en relations internationales et en sociologie, je voyage au Liban.

Sous la direction de Thierry Hentsch, commence une réflexion sur l’identité et l’altérité, le rapport entre soi et l’autre qui aboutira à ma thèse de doctorat soutenue en 1998 avec mention d’excellence académique (publiée sous le titre La Nef marrane : retour du Judaïsme aux portes de l’Occident, 2001). J’occupe ensuite un poste de chercheure post-doctorale à l’INRS. Je publie des rapports de recherche, participe à des colloques au Canada et à l’étranger et cherche un poste dans une université canadienne tout en élevant mon fils Pierre né en novembre 2000. La naissance dramatique de Lucie en novembre 2002 sonne le glas de ce cheminement. Je renonce à une carrière universitaire et je cesse toute activité professionnelle pour m’occuper de Lucie durant 2 ans. Lorsque celle-ci entre en garderie à l’automne 2004, l’université du Québec à Montréal m’offre un poste de chargée de cours pour enseigner l’analyse politique. C’est un poste à temps partiel compatible avec mes choix familiaux. J’accepte.

La mort de Thierry Hentsch en 2005, décédé en quelques mois d’un cancer du pancréas, me laisse intellectuellement orpheline. Pour compenser cette perte, je plonge dans son oeuvre, j’y entends sa voix à chaque page, et le dialogue mené pendant 15 ans, se poursuit au-delà de sa disparition. J’enseigne son oeuvre, découvre la philosophie de Platon, revue et visitée par Thierry, une perspective iconoclaste que je reprends derrière lui. C’est ma troisième prise de conscience : je monte un nouveau cours de philosophie politique dans lequel je fais la critique du modèle de la science moderne appliquée aux sciences humaines et prône un retour à la philosophie, seule discipline apte à comprendre l’humain comme sujet. Il s’agit donc, encore une fois, de sortir de la caverne. 2

Mon cheminement académique se termine officiellement en 2013 lorsque je quitte définitivement l’université pour m’installer comme neurothérapeute en France. Un autre chemin de recherche est déjà amorcé depuis plusieurs années, cette fois-ci dans le domaine de la paralysie cérébrale. Et c’est là bien sûr que le cerveau fracassé de Lucie joue son rôle.

Le 15 novembre 2002, Lucie meurt dans mon ventre à la suite d’un décollement placentaire prématuré. Elle fait une hémorragie complète, se vidant de son sang par le cordon ombilical. Elle nait par césarienne d’urgence, la réa prend 25 minutes avant d’obtenir un battement cardiaque. Les protocoles de réa ne sont pas respectés. Le pronostic est clair, Lucie a de bonnes chances de survivre car les fonctions vitales ne sont pas atteintes, mais le cerveau est détruit et Lucie restera neurovégétative.

1. Les écueils de la médecine face à la paralysie cérébrale

1.1 L’échec des stratégies neurologiques

Après la naissance, Lucie convulse pendant 48h et montre dès le départ des résistances marquées à la trithérapie.

A cinq mois, Lucie développe de l’hypsarythmie, en d’autres termes un chaos cérébral. Lucie a perdu un nombre important de neurones à la naissance, la matière grise et la substance blanches sont « minces » selon les rapports. Toutefois, il reste des neurones et ceux-ci se connectent, mais n’importe comment, de façon chaotique et sans construire quelque chose… Un bon exemple pour illustrer cela est la fonction visuelle. Chez Lucie, les yeux ne posent pas de problèmes, par contre, le cerveau ne réagit pas adéquatement à la stimulation visuelle. Lucie réagit à la lumière, mais le cerveau ne donne manifestement aucun sens à ce que les yeux voient3. De ce fait, Lucie est atteinte de cécité corticale. L’hypsarythmie est une forme de généralisation de ce problème, les connections entre neurones s’établissent, mais construisent pas normalement le cerveau.

Les différentes médications proposées par la neurologue sont un échec. Lucie est pharmacorésistante. Après plusieurs mois de recherche d’une solution, en désespoir de cause, elle propose une hospitalisation pour lui administrer des corticoïdes à haute dose en intraveineuses. Mais elle part en vacances et transmet le dossier à une collègue qui me propose une nouvelle molécule. J’achète le médicament, mais ne l’administre pas. Je pars moi-même en vacances en France et Lucie aura deux séances de fasciathérapie avec Christian Carini (auteur du livre Les mains du coeur, 1995) qui est un ami de ma mère. L’EEG effectué dans la foulée montre qu’il n’y a plus d’hypsarythmie. Elle cessera quelques temps d’avoir des myoclonies qui reprennent six mois plus tard, suite à un traitement en chambre hyperbare.

A 5 ans, Lucie fait sa première crise tonico-clonique, un état de mal prolongé. Il faut la conduire aux urgences. Lors du rendez-vous de contrôle avec la neurologue quelques semaines plus tard, celle-ci me fait part de son étonnement que Lucie ait survécu à l’intervention médicale. Elle ne comprend pas que son coeur ait tenu avec les doses de cheval qui lui ont été administrées. Elle refera une nouvelle crise deux ans plus tard. Je me dirige vers un hôpital où Lucie n’est pas connue et la crise est avortée en quelques minutes au valium.

Les traitements conventionnels anticonvulsivant administrées à Lucie n’ont jamais permis de faire disparaître les myoclonies, ni d’empêcher les convulsions. Par contre, ils ont eu des effets secondaires dramatiques, Lucie passant son temps à pleurer et ne dormant plus la nuit. Les traitements conventionnels ont été abandonnés, faute de résultats, et remplacés par un traitement homéopathique. Lucie fera périodiquement de manière très espacées des crises tonico-cloniques du réveil qui la laissent épuisée mais n’ont pas d’incidence sur sa santé globale. Comme elles sont rares, nous convenons avec la neurologue que je dispose d’une dose de valium intrarectale à administrer en cas de crise de plus de 5 minutes. Je ne l’utiliserai dans les faits qu’une seule fois.

1.2 L’échec des stratégies réadaptatives

La réadaptation médicale est l’approche la plus symptomatique du cadre mental dans lequel s’inscrivent les stratégies thérapeutiques conventionnelles. La voie de Lucie est fixée d’avance : un diagnostic de tétraparésie spastique est posé. Cela implique une hypotonie axiale et une hypertonie des quatre membres qui vont conduire à des luxations articulaires précoces. La réadaptation vise donc à pallier aux conséquences du handicap cérébral et à anticiper le développement de la spasticité. Lucie portera des orthèses tibiales et des orthèses aux mains pour éviter les luxations. Elles sont sans effet. Lucie est très vite verticalisée, en position assise et debout. La verticalisation de Lucie attachée dans une station debout va avoir des conséquences dramatiques. Lucie va rapidement développer un patron d’hyper extension qui va aggraver les luxations des membres inférieurs.

A l’époque, je ne sais pas expliquer ce que je vois, je ne peux le traduire qu’aujourd’hui en toute connaissance de cause. Lucie n’est pas dissociée, les mouvements de tête qui ne sont pas contrôlés vont provoquer des réactions en chaine sur la colonne vertébrale et les membres inférieurs : hyper-extension de la colonne vertébrale (réflexe spinal de Perez), adduction des membres inférieurs (qui va provoquer une tension sur la hanche gauche qui va au finale provoquer la luxation de la hanche), contraction des ischio-jambiers maintenus en extension forcée, réflexe de babinsky qui va provoquer la luxation des pieds en valgus.

1.3 L’échec des stratégies rééducatives

Lucie est très rapidement prise en charge par une équipe de recherche de l’hôpital Sainte- Justine. Elle aura des séances de kinésithérapie deux fois par semaine dès le mois de janvier 2003, puis quelques mois plus tard, des séances d’ergothérapie tous les 15 jours sont mises en place. Elle sera suivie dès l’année suivante au centre de réadaptation Marie Enfant.

Rapidement, Lucie s’oppose aux thérapies, elle se met à pleurer, se tétanise, résiste. Ce que je vois me déconcerte. Ce qui se passe sous mes yeux, c’est la mise en place d’interventions qui loin de prévenir la situation l’aggravent.

Les dommages occasionnés par le développement rapide de la spasticité sont irréversibles. Les contractures musculaires vont conduire à un important flexum des genoux, un effondrement de la voute plantaire, une déformation des pieds avec luxation des tarses, l’apparition d’un hallux valgus important, fixation de la cheville à 90° et finalement une luxation de la hanche gauche. Une fois les déformations bien installées, le physiatre demande que nous consultions un orthopédiste. Celui-ci finalement nous déconseille l’opération. L’intervention sur la hanche luxée, les genoux et les pieds prendraient plus de 10 heures, imposeraient 6 semaines d’immobilisation et 6 mois de rééducation. Compte-tenu de l’absence manifeste de développement de Lucie, il déconseille l’opération qui selon lui n’aurait de toute façon pas d’effet à long terme. En effet, nous explique-t-il, il va intervenir sur les symptômes et non sur les causes de la spasticité, de ce fait, mêmes causes, mêmes effets.

A 4 ans, le niveau de développement de Lucie est celui d’un enfant de 4 mois.

Il est important de comprendre pourquoi la médecine actuelle est tenue en échec par les handicaps cérébraux. L’expérience de Lucie et les observations que j’ai eu à faire pendant 16 ans m’ont conduite à penser que les approches conventionnelles sont essentiellement palliatives, elles ne cherchent pas du tout réparer des cerveaux, mais seulement à prendre en charge les symptômes. Et il y a des très bonnes raisons à cela, réparer un cerveau est reconnu comme quelque chose d’impossible. Il existe un important consensus autour des enfants atteints de déficits moteurs cérébraux : au Québec on appelle ça la paralysie cérébrale et c’est irréversible. On ne peut qu’essayer de lutter contre les symptômes. C’est finalement, un véritable aveu d’échec. Face aux problèmes neurologiques, la médecine occidentale moderne est impuissante.

Pour comprendre le schéma mental dans lequel opère la médecine occidentale moderne et ses préjugés, au sens propre du terme, il faut revenir à l’histoire de la science moderne et donc à mon propre parcours académique puisque c’est précisément ce sujet que j’enseigne à l’université. Lucie ne met pas un terme à mes recherches, elle m’impose de les poursuivre dans un autre domaine qui, loin de contredire mon cheminement intellectuel, le prolonge et l’approfondit par une réflexion sur la médecine occidentale moderne.

2. Le cadre paradigmatique de la médecine occidentale moderne

2.1 Qu’est-ce qu’une science ?

La science est par définition un savoir incertain et provisoire qui repose sur un consensus entre scientifiques et sur un paradigme de base qui procure un cadre mental à notre vision du monde et à nos connaissances. Au bout d’un certain temps, les techniques de mesure s’affinent et montrent des incohérences qui remettent en question la pertinence du système global et appellent une nouvelle révolution scientifique sur la base d’un nouveau paradigme (Thomas Kuhn, La structure des révolutions scientifiques).

La science moderne s’est construite sur une révolution paradigmatique, la révolution copernicienne. Le changement de paradigme qui veut que la terre tourne autour du soleil et non l’inverse va donner naissance à la physique moderne qui deviendra le modèle même de toutes les sciences ultérieures, biologie, chimie et même les sciences humaines. La révolution copernicienne est née de l’apparition de nouvelles méthodes de calcul du mouvement des astres dans une école d’astronomie perse. Copernic reprenant la méthode en arrive à penser qu’on ne peut plus considérer que le soleil tourne autour de la terre, mais que c’est le contraire qui apparait cohérent avec les calculs mathématiques.

La révolution est d’importance pour deux raisons. La première, c’est la remise en question de nos connaissances issues de l’observation. Nous voyons tous, en tout point du monde que le soleil se lève à l’Est et se couche à l’Ouest. Or les mathématiques renversent ce postulat et nous imposent de nous méfier de nos perceptions limitées. La seconde, c’est que l’affirmation de Copernic remet en question la vision religieuse du monde qui prévaut à son époque. Durant tout le Moyen-Age, les connaissances s’inscrivent dans un cadre mental dominé par la théologie et les théologiens. Au départ, l’affirmation de Copernic passe relativement inaperçue, mais elle est reprise par Galilée, en Italie, alors que L’Eglise catholique est au prise avec le mouvement de la Réforme. Galilée sera jugé, condamné et assigné à résidence. Et pourtant dit-il en sortant de son procès « elle tourne ».

Galilée est le père de la physique expérimentale moderne. C’est à lui encore que nous devons cette affirmation que « la nature est un livre écrit en langage mathématique ». Pour connaitre le monde, il suffit donc de l’écrire en équation. Nous savons l’avenir d’une telle proposition. Newton par la suite fondera les assises mécaniques de la physique. La vision du monde née de la physique mécanique va peu à peu remplacer l’ancien paradigme religieux de la société européenne. Physique et métaphysique ne sont plus conciliables.

Descartes bande toutes ses forces pour maintenir dans un même arc de vérité physique et métaphysique. Il échouera. Par contre le postulat de départ de sa pensée, « Je pense donc je suis », constitue le fondement de notre rapport au monde et de notre divorce avec la nature. Ce qui se met en place avec Descartes, c’est une sortie de l’homme de la nature et le cadre mental qui est le nôtre aujourd’hui.

Comme le dit Thierry Hentsch « l’auto-institution de la vérité par la raison cartésienne (…) ouvre la voie à l’autonomie de la science » (Introduction aux fondements du politique : 89-90).

Il importe peu que Descartes, Newton et les savants qui les suivent croient ou non en Dieu. Ce qui se passe avec la modernité, c’est que nous n’avons plus besoin de Lui. L’homme a pris sa place car ce qui compte désormais, ce ne sont plus les questionnements métaphysiques, mais bien la possibilité pour l’homme de gouverner la terre à tout point de vue. De l’homme occidental s’entend. L’homme devient le grand démiurge, et les sciences de la nature qui prennent un essor incroyable à partir du dix-neuvième siècle reposent sur la puissance de la causalité. Dieu est mort affirmera Nietzsche. C’est la suprématie de la raison sur l’intuition qui l’a tué.

Nous sommes tous, que nous le voulions ou non, cartésiens. Descartes instaure la séparation entre le sujet et l’objet, entre le corps et l’esprit, entre l’homme et la nature. La raison devient notre principal instrument pour la connaissance d’un monde qu’elle fractionne à l’infini. La dualité fondamentale introduite par Descartes est la base de l’objectivité. On croit désormais que le monde peut être décrit objectivement. La dualité entre le sujet et l’objet devient un idéal scientifique. Le principe de la science, son principe objectif, est d’isoler un objet et d’effectuer différentes expérimentations sur lui.

L’autre très grande contribution de Descartes provient des règles de la méthode. Il part du postulat que le savoir ne pourra avancer sans l’analyse qui consiste à diviser chaque chose en ses éléments constitutifs. La pensée ne peut rien saisir qu’en divisant, décomposant les choses complexes en éléments simples. En dernier ressort, à partir des éléments simples, l’esprit pourra par intuition en déduire le complexe. En science aujourd’hui, l’intuition n’a aucun statut reconnu, elle est pourtant fondamentale dans la découverte de nouvelles idées. Mais la science rigoureuse ne peut s’appuyer sur elle. L’analyse et la division reste la méthode privilégiée ainsi que le raisonnement logique, ce que Descartes appelle la démonstration géométrique.

La division des savoirs en différentes spécialités est la réalité d’aujourd’hui. Il ne peut plus exister de savants à l’image de Da Vinci. La somme finale des savoirs qui restait l’objectif de Descartes n’est évidemment plus possible. Le monde dans lequel nous vivons est celui de la mécanique qui conçoit le monde en objets distincts reliés entre eux par des règles de causalité.

A notre échelle, en physique mécanique « Tout événement possède une cause unique et parfaitement identifiable et il donne lieu à une évolution connue à l’avance. » (François Rothen, Aux limites de la physique : les paradoxes quantiques : 102)

L’une des règles fondamentales de l’expérimentation scientifique, c’est la nécessité d’une action visible et mesurable. La science se doit d’être prédictive : une expérience est scientifiquement valide si on peut la reproduire. En ce sens, la science est très utile dans une société de production comme la nôtre. La possibilité de prévoir ce qui va se passer est évidemment très utile. Il est heureux par exemple que dans le monde de la physique mécanique, la balle de fusil tue l’ennemi. Imaginez l’intérêt d’un fusil si la balle se comportait de façon totalement imprévisible, dans un univers de probabilité comme c’est la cas en physique quantique? Elle pourrait alors soit tuer l’ennemi, soit rebondir sur lui et tuer quelqu’un d’autre, y compris celui qui tire. L’Europe n’aurait évidemment pas conquis le monde dans ces conditions.

Sans partir dans une réflexion épistémologique d’envergure qui n’a pas sa place ici, j’emprunterai les mots de Thierry Hentsch qui a longuement développé la question des limites de la science moderne dans son oeuvre.

A vrai dire, écrit-il, nous savons que le prestige et la force de la science ne lui vient pas de ce qu’elle nous permet de comprendre, qui est fort peu de choses, mais plutôt de ce qu’elle nous permet de faire, qui nous apparait souvent prodigieux. La puissance de la cause ne procède pas tant de sa capacité explicative (…) que de sa capacité opérationnelle. L’expérimentation qui vérifie l’effectivité de la cause devient de ce fait un instrument de manipulation du réel, instrument rudimentaire d’abord, puis de plus en plus perfectionné qui augmente la panoplie des techniques. C’est par l’enchainement des expérimentations et des nouvelles techniques, les unes suscitant la mise au point des autres et ces dernières s’ajoutant aux outils des premières pour ouvrir encore davantage le champ à l’investigation scientifique, c’est par cet enchainement, donc, que se constitue ce que nous avons appelé la techno-science. Et l’inépuisable merveille de la techno-science, c’est que ça marche ! (…) La vraie force du « ça marche ! » dans notre monde, c’est qu’il donne du pouvoir – ou du moins l’illusion du pouvoir. (Introduction aux fondements du politique : 94-95).

Illusion du pouvoir et illusion du savoir, car ce que la science sait est une goutte d’eau dans un océan d’ignorance. Nous savons aujourd’hui que la physique n’a pas percé la connaissance de la Nature qui nous échappe totalement. Comme le disait Kant, l’objet n’est jamais la chose en soi qui échappera toujours à notre savoir. Mais elle nous permet d’agir sur elle, à notre échelle. Et notre puissance d’agir sur le monde nous a conduit au bord du gouffre.

Le caractère objectif de la science est en soi une contradiction. Il n’y a aucune « objectivité » de la science. C’est un leurre complet. La science s’appuie non sur la contemplation du monde en soi, ce qui est une démarche philosophique qui part de l’idée que le monde agit sur nous, nous fait quelque chose, mais bien sur l’inverse, c’est-à-dire notre pouvoir en tant que sujets à agir sur le monde. La science moderne est une science totalement subjective, fondée sur le primat du sujet de Descartes : Je pense donc je suis et la réification du monde. Ce qui en terme moderne devient « je suis capable d’agir sur le monde, de le conquérir et de l’asservir à mes besoins ». Il n’y a pas beaucoup de sagesse là-dedans, seulement une infinie soif de puissance.

2.2 La médecine scientifique

La médecine occidentale moderne, comme toute science, sépare le sujet et l’objet, le praticien et son patient. Le gros problème en l’occurrence c’est que le patient est un sujet lui aussi. Et comme toutes les sciences humaines, et plus que les autres, la médecine est confrontée constamment à ce retour du sujet. Elle instaure donc, de façon inconsciente le plus souvent, un rapport hiérarchique entre le sujet/médecin et le sujet/patient. D’un côté celui qui sait, de l’autre celui qui ignore. Entre les deux, il y a la maladie, car le médecin n’étudie pas vraiment les patients, toujours interchangeables, jamais les mêmes qui défilent dans son cabinet, dans son service hospitalier. Il étudie des symptômes. La médecine est la science des maladies. Elle ne s’occupe pas vraiment des êtres humains.

Norman Doidge remarquait dans son livre Guérir grâce à la neuroplasticité que la médecine recourait essentiellement à un discours métaphorique militaire : la médecine fait la guerre à la maladie, elle a recours à un arsenal thérapeutique, elle lutte contre le cancer, elle combat le SIDA. Cet ancrage terminologique est évidemment inconscient. Il y a probablement des raisons historiques, lié à l’essor de la chirurgie sur les champs de bataille. La plus grande avancée scientifique de la médecine après la découverte de l’asepsie, c’est bien entendu la vaccination qui permet « d’éradiquer » des maladies grâce à des « campagnes » de vaccination à grande échelle et, en ce qui concerne, la France imposée par la loi à toute la population.

Héritière des développements de la physique, de la biologie et de la chimie, la science médicale moderne s’inscrit dans un cadre mental qui lui impose des spécialisations de plus en plus pointues. Elle est aussi fondée par Descartes dans la mesure où elle opère dès le départ une distinction entre le corps et l’esprit. Puis elle divise le corps en un nombre incalculable de parties, chacune devenant l’objet d’une spécialité. La spécialisation contribue grandement à la réification des « patients » qui ne sont plus tellement des êtres humains, mais des porteurs d’organes, chaque organe étant traité indépendamment du tout. Face aux spécialistes, le patient se retrouve dans une position d’ignorance, ce que le médecine sait et dit, il est lui, bien obligé de le croire4.

L’autre problème de la médecine scientifique tient au statut de la preuve. Comment établir la science médicale sur les mathématiques, le seul langage valide de la science ?

La médecine moderne repose sur des connaissances validées scientifiquement grâce à des démonstrations par la preuve, ce que l’on appelle aujourd’hui The Evidence-base Medecine fondées sur des recherches quantitatives, statistiques, et des expérimentations à grande échelle comparant des groupes de patients auxquels sont administrés des médicaments à d’autres qui reçoivent un placebo. Cette approche quantitative n’est pas l’apanage de la médecine. Toutes les sciences humaines sont confrontées à la difficulté de mathématiser leurs résultats. Quantifier est une « exigence » de toute discipline qui se dit scientifique. Les statistiques ne nous permettent cependant pas de prédire des résultats, elles peuvent seulement établir des probabilités. Cette médecine là non plus n’a pas affaire à des individus, mais à des groupes. Elles établissent un imposant consensus dans le milieu médical. La médecine d’aujourd’hui est grandement tributaire de l’essor spectaculaire de la chimie et son arme principale, à côté de la chirurgie, c’est le médicament.

Le problème des ERC (Essais Randomisés Contrôlés), au-delà de leur indéniable quantification de la réalité, c’est qu’ils sont difficilement reproductibles. Or le premier critère d’une science, c’est qu’une expérimentation pour être valable doit pouvoir être refaite et parvenir aux mêmes résultats.

« Le Dr. Ioannidis a montré que 35% des meilleures ERC n’aboutissent pas aux mêmes conclusions quand on les réédite et que la plupart des études menées sur des groupes en science de la vie sont impossibles à reproduire. Nature, l’un des plus grands journaux scientifiques de référence, évoque à ce propos un « malaise de réédition » (replication crisis). (Doidge : 597)

Les statistiques sont un instrument commode de classification, mais en elles-mêmes, elles ne guérissent pas. Elles permettent de collecter un nombre réduit d’informations sur un large groupe de population, mais elles ne permettent pas de savoir si l’individu en face du médecin va guérir ou non. Face au cancer par exemple, on peut dire au malade qu’il a 90% de chance de guérir s’il accepte les protocoles thérapeutiques, mais rien ne permet de dire qu’il ne fait pas partie des 10% qui vont mourir. Ce qui est arrivé à une de mes amies chercheure, il y a quelques années décédée d’un cancer du sein. Les médecins critiquent ouvertement certaines approches qui offrent de « faux espoirs » aux patients, alors qu’eux-mêmes qui s’appuient sur des études randomisées ne font finalement pas mieux.

Ce que les études statistiques démontrent c’est que les médicaments donnent des résultats supérieurs aux placebos. Ce qui m’intéresse ici le plus, c’est l’idée même de placebo… C’est le fait qu’un pourcentage souvent non négligeable de gens malades guérissent quand on leur donne une pilule de sucre ou autre succédané. Le phénomène d’auto-guérison à l’oeuvre devrait à elle seule susciter un immense intérêt de la part de la communauté scientifique. C’est le contraire qui se produit. On l’écarte du revers de la main. Le principe d’auto-guérison dérange. Il ramène sur le devant de la scène l’individu, le sujet, sa spécificité et sa complexité.

Cette médecine de masse est aujourd’hui fortement ébranlée et remise en question. Nombres de médicaments validés scientifiquement ont démontré une fois sur le marché qu’ils causaient des effets secondaires problématiques, sur le court ou sur le long terme. La question des effets secondaires est un effet tout à fait indésirable qui résulte directement de la réification du patient. Si l’impact sur la maladie ou sur l’organe visé est positif, son impact sur la santé globale est fortement remis en question aujourd‘hui. Les effets secondaires sont considérés comme un moindre mal pour le plus grand bien. D’ailleurs, les médecins sont bien conscients que s’ils devaient nommer toute la liste des effets indésirables possibles du médicament qu’ils prescrivent, il est fort possible que leurs patients les prennent pour des fous. Lorsqu’un médecin prescrit de la ritaline à un jeune patient, il ne dit pas aux parents qu’aux Etats-Unis, les recherches prouvent que les adolescents qui ont pris de la ritaline depuis l’enfance ont statistiquement plus de chance de faire des dépressions et de se suicider.

Les avancées des neurosciences au cours des trente dernières années, les nouveaux moyens d’investigation du corps (radiographie, scanner, IRM et autres) permettent aujourd’hui de mieux connaître le fonctionnement du vivant5. Toutefois, face au cerveau, la science médicale est globalement impuissante à trouver des causes aux principales maladies cérébrales. Et ignorante des causes, elle est souvent impuissante à trouver des solutions, c’est-à-dire à guérir ses patients.

Elle connait des symptômes et peut éventuellement agir sur eux, notamment par le biais de la médication. Mais elle ne guérit pas. Elle fait face à des maladies réputées incurables qui lui imposent parfois l’usage de médicaments « à vie », comme c’est le cas par exemple avec l’épilepsie, la dépression, la schizophrénie ou d’autres désordres psychiques, ce qui l’oblige à composer avec les effets secondaires, les problèmes d’accoutumance, l’enchaînement infernal de médicaments additionnels pour lutter contre les effets secondaires, la baisse de l’immunité par destruction de la flore intestinale etc. Dans le cas de l’épilepsie, la cause est inconnue dans 98% des cas. On sait comment « contrôler » l’épilepsie, mais on ne sait pas toujours, même quand on parvient à la contrôler, pourquoi ça marche.

Comme hier l’Eglise, la médecine se réfugie dans une orthodoxie rigoureuse et emprunte à l’Eglise ses armes et son vocabulaire. Elle devient dogmatique, elle érige des temples de plus en plus grands, de plus en plus couteux, combat les hérétiques qu’elle accuse de sectarisme, dispose d’une instance inquisitoriale, l’Ordre des médecins qui a pour arme principale l’excommunication des déviants. On recense les pseudo-médecines et les approches médicales jugées déviantes, c’est-à-dire qui remettent en question le consensus établi6. A l’intérieur du corps médical aujourd’hui, le débat fait rage entre ceux qui prônent l’orthodoxie pure de la médecine allopathique et ceux qui prônent une ouverture aux approches médicales nouvelles dites alternatives ou complémentaires.

L’ancien paradigme est ébranlé par des échecs, des remises en question et plus simplement par les insuffisances qui se révèlent avec le temps. La masse de gens qui ne font plus confiance aux médicaments augmente.

Nous sommes à l’aube d’une mutation où la médecine conventionnelle est en train de perdre son monopole dans les faits et les croisades lancées aujourd’hui par des groupes de médecins affolés n’y pourront rien. L’Ordre des médecins pourra toujours excommunier les dissidents, son action ne peut être qu’un épiphénomène face à des individus isolés, elle ne pourra rien contre l’effet de masse7. La recherche d’alternative ne vient pas tant du fait qu’il existe des alternatives que du fait que, dans certains cas, la médecine occidentale moderne est impuissante. De plus, ses liens inextricables avec le cartel des grands laboratoires pharmaceutiques et le dictat de l’Evidence Base Medecine, tend aujourd’hui à limiter son indépendance et sa crédibilité. La mutation est en cours et une médecine qui ne s’ouvrirait pas aux changements est condamnée à se rigidifier, se scléroser, à s’épuiser dans de vaines croisades.

Lorsqu’un système se met à dysfonctionner, qu’il est contredit de l’intérieur par ses propres échecs, alors un nouveau paradigme apparait qui renverse le cadre mental et le rend obsolète. C’est la nécessité de sortir de l’impasse qui pousse à l’apparition d’un nouveau paradigme.

Dans son livre Where Medecine Went Wrong, le docteur en physique Bruce West définit quatre types de chercheurs : les sauteurs, qui font un saut en avant hors des systèmes en cours, ils voient plus loin que les autres ou voient des choses que personnes ne voient encore. Ce sont des précurseurs, ceux qui ouvrent la voie à de nouveaux paradigmes. Les autres se divisent en trois groupes, les grimpeurs explorent les pistes laissées en friche dans le modèle paradigmatique existant, les dormeurs qui ne participent plus aux recherches mais enseignent aux autres ce qu’eux-mêmes ont appris, et enfin les gardiens qui effectuent des recherches extrêmement pointues à l’intérieur du paradigme en place pour le consolider et s’opposent à toutes les théories nouvelles (Doidge, Guérir grâce à la neuroplasticité : 589-590)

On comprend le sort des sauteurs face aux trois autres groupes de chercheurs, les précurseurs ne sont pas les bienvenus parce qu’ils ébranlent un édifice que tous les autres ont intérêt à maintenir.

3. Remise en question: vers une nouvelle révolution scientifique

3.1 De la paralysie cérébrale à la plasticité cérébrale

La médecine se trouve confrontée à des guérisons ou des améliorations qu’elle n’explique pas et qu’elle ne croyait pas possible. Face à à ce phénomène, il y a toujours quelqu’un pour se récrier : « Ce n’est qu’une anecdote, une simple anecdote ! Où sont les essais randomisés contrôlés ? » (Doidge : 592).

Quand vous soulevez des paradoxes en médecine et évoquez des pratiques qui sortent du paradigme actuel, on vous répond « ce n’est pas scientifique ».

A l’origine des guérisons spectaculaires, il y a la volonté du patient de trouver lui-même des solutions refusant le verdict médical. Le terrain où cette volonté s’est le plus souvent imposée, c’est bien sûr dans le cas du cancer. Pour reprendre la métaphore militaire, quand le patient se bat pour survivre, ses chances sont meilleures que quand il baisse les bras.

La notion de placebo est fondamentale pour moi car elle ramène l’esprit sur l’avant-scène et la réalité du sujet que la science a voulu extirper une fois pour toute de son arsenal en faisant de tout patient un objet passif auquel on administre un traitement. Ce qu’on a chassé par la porte revient par la fenêtre. Le retour du sujet, c’est aussi le retour de l’individu dans toute sa complexité. Celui qu’on ne peut réduire à des statistiques et à des probabilités. C’est particulièrement vrai dans mon cas, face au défi que présentait Lucie. Si j’avais baissé les bras, si j’avais cru les médecins qui condamnait Lucie à l’état de légume, si je n’avais rien fait, elle serait évidemment un légume aujourd’hui. De cela, je n’ai aucun doute. Si je les avais laissé faire, ils auraient enfermé Lucie dans leur diagnostic et les stratégies qu’ils me proposaient leur auraient donné raison. La croyance que Lucie ne pourrait pas se développer aurait induit la réalité.

La chose qui m’a le plus aidée après la naissance dramatique de Lucie, c’est cette phrase de ma soeur pédiatre : « Ne les crois pas, ne crois que ce que tu vois : c’est toi la mère ». Je n’ai pas remis en question le diagnostic initial, j’ai observé et essayé de comprendre ce qui se passait. Or face aux approches conventionnelles, ce que je voyais ne faisait pas sens.

La neurologue qui a suivi Lucie de sa naissance à notre départ de Montréal est un parfait exemple de médecin moderne. Elle opère dans le cadre mental de la paralysie cérébrale. Pour elle, le cerveau n’est pas réparable. Avant chacune de nos rencontres, elle regardait l’EEG, puis prescrivait un médicament. Elle réduisait Lucie à son EEG. Quand fut constaté d’une part l’inefficacité des médicaments sur l’épilepsie, d’autre part les effets néfastes de la médication, quand elle a cessé de faire des prescriptions, elle nous a donné congé. J’ai compris que son rôle se limitait à signer une ordonnance. Pourtant, face au développement totalement inattendu de ma fille, elle a quand même fini par me dire que Lucie lui donnait à réfléchir car elle faisait « mentir » les statistiques.

Dans les faits, Lucie va suivre un chemin différent, sortir des approches conventionnelles et contre toute attente, elle va effectivement se développer. Suivant des approches différentes, il est donc normal qu’on ait obtenu des résultats différents.

A 4 ans, Lucie a atteint le développement d’un bébé de 4 mois. Comme je l’ai dit plus haut, elle est très abimée quand j’entreprends de me tourner vers des approches alternatives. Ce que je constate durant toutes les années de prise en charge conventionnelle, c’est que rien de ce qui est fait ou proposé n’a de sens à mes yeux. Les thérapies sont insupportables, et aggravent la situation. Il me faut 1H30 à pieds pour me rendre de chez moi à l’hôpital. Lucie est en porte bébé. Je passe par les parcs, nombreux et très grands à Montréal, j’adore marcher. Quand nous arrivons à l’hôpital, Lucie est totalement détendue8. La kinésithérapeute va passer une heure à lui tirer sur les membres pour éviter la spasticité. Elle agresse Lucie, qui pleure, se débat et en sort vaincue, épuisée et… plus spastique que lorsqu’elle est arrivée. C’est à mes yeux un total non-sens. Il me faudra des années de recherches et d’études pour comprendre ce que j’observe et leur donner sens.

Sur le plan physiologique, si vous voulez travailler le relâchement d’un muscle, vous devez faire se contracter le muscle antagoniste. Pour obtenir l’allongement des ischio-jambiers, il faut contracter les quadriceps, pas tirer sur les ischio-jambiers. Un muscle étiré va automatiquement répondre par une contraction. Ainsi la kinésithérapeute a permis et encouragé la spasticité musculaire de Lucie. La kinésithérapeute se trompe, parce qu’elle ne respecte pas les lois de la physiologie qu’elle connait pourtant, forcément, très bien. Elle ne tient pas compte de ce qu’elle sait, parce qu’elle lutte contre le mal. Elle agit non pas avec Lucie, mais contre ses dysfonctionnements. Elle ne tient pas compte des réactions du Lucie qui souffre et qui pleure. Elle opère dans un cadre mental consensuel qui l’empêche d’observer ce qui se passe et de corriger le tir. Au contraire, elle persévère parce que son but est de combattre la spasticité pour « le bien » de Lucie. L’expérience va se renouveler à l’identique quand Lucie recommence la kinésithérapie et l’ergothérapie dans l’établissement spécialisé qui l’intègre à son arrivée en France. Les résultats sont catastrophiques.

Quand une danseuse effectue des étirements musculaires, d’une part elle s’est échauffée, d’autre part, elle inhibe volontairement la réaction normale du muscle qu’elle étire et ne tient pas compte de la douleur. Le lobe frontal prend le contrôle des zones subcorticales et inhibe les réactions de protection. Ce n’est pas possible avec un bébé, encore moins avec un bébé atteint cérébralement.

Il existe un large consensus en rééducation concernant la spasticité cérébrale qui n’a toutefois aucun fondement scientifique. On utilise largement deux types d’intervention sur les articulations : les mobilisations passives (mouvements passifs effectués par le thérapeute sans participation du patient) et les étirements (traction exercée par le thérapeute ou au moyen d’orthèses, plâtres etc… sur des périodes longues).

Une étude réalisée à la faculté de Médecine de l’Université de Montréal en 2014 démontre à partir d’une recension de la littérature que ces deux techniques n’apportent aucun résultat positif sur les contractures ni sur la spasticité des patients atteints neurologiquement. Une méta-analyse a été menée par Katalinic & coll. en 2010 parvient aux mêmes conclusions. Les étirements et les mobilisations passives n’ont pas d’efficacité ni immédiates, ni à long terme. Par contre, les résultats de leur méta-analyse a permis de révéler une augmentation de la douleur post-traitement immédiat (Catherine Rodgers, 2014 : 78-99). Les auteurs en concluent que ses pratiques n’améliorent pas les choses mais semblent permettre de maintenir les choses en l’état, ils ajoutent qu’il serait intéressant de réaliser de nouvelles études sur des patients dont la spasticité n’est pas encore en place, soit de façon préventive. Le résultat sur Lucie me fait douter de la validité de cette hypothèse.

La paralysie cérébrale n’est pas une cause, mais une conséquence. Elle n’est pas le résultat d’un cerveau lésé, mais la conséquence d’un dysfonctionnement global dans la circulation de l’information. Le cerveau engramme mal l’information envoyée au SNC par le système nerveux périphérique et recevant mal l’information, il ne sait pas y répondre correctement. Pour permettre les connexions cérébrales, il faut informer le cerveau, lui donner les informations qu’il ne parvient pas à engrammer, à intégrer parce que les chemins sont bloqués9. Il faut respecter les lois mêmes du développement cérébral et l’ordre d’engrammation des informations normales prévue par la nature pour faire de nous des êtres humains.

Les kinésithérapeutes ignorent ce principe, elles sautent par-dessus les étapes. Elles les ignorent, elles tentent par tous les moyens d’apprendre aux enfants à se tenir debout et à marcher. Cet objectif est celui des médecins en réadaptation également. Il existe un consensus très fort sur la nécessité fondamentale de verticaliser les enfants atteints de paralysie cérébrales, cela par tous les moyens, y compris les attacher debout, c’est-à-dire les paralyser. C’est un énorme paradoxe. La rééducation et la réadaptation ne travaillent pas sur les prérequis de la marche, les étapes de la motricité volontaire: se retourner, redresser la tête, se mettre en appui sur les avant-bras, ramper, se mettre à quatre pattes, accroupi etc., pour ne rien dire des réflexes infantiles qui précèdent et préparent l’apparition de la motricité volontaire.

Toutes les thérapeutes qui sont intervenus auprès de Lucie ont tenté de « l’éduquer », c’està- dire de lui « apprendre » à faire des choses qu’aucun enfant n’apprend. Le développement cérébral est causé d’abord et avant tout par notre rapport au monde. Il est inné et non acquis. Un enfant n’apprend pas à marcher. Il marche, après tout un processus de maturation cérébrale intrinsèquement relié au fonctionnement du système nerveux périphérique. Il dépend d’abord et avant tout de la maturation du système nerveux somatique, par le biais de l’intégration des réflexes, par le développement de la motricité complexe, dite volontaire, par l’évolution de la motricité globale et ensuite de la motricité fine. En d’autres termes, les enfants « n’apprennent » pas vraiment grand-chose avant l’âge de 7 ans, l’âge de raison. Soit une fois que le lobe frontal justement est bien développé et solidement connecté au reste du système nerveux central. Avant cela, ils font l’expérience de leur rapport au monde par le biais du système nerveux périphérique et ils y sont préparés par leur programme génétique d’être humain.

Nous sommes une civilisation marquée par la suprématie du lobe frontal : Je pense donc je suis. On exige donc d’un enfant qu’il développe sa volonté, pour que sa conscience rationnelle prenne le contrôle du reste du cerveau. C’est méconnaitre le système nerveux que de le réduire au lobe frontal et à nos capacités d’apprentissage. Même si le lobe frontal représente 40% du cerveau, ce n’est pas là que ça se joue. Si l’organisation subcorticale est insuffisante, faire appel à toutes les ressources corticales pour prendre le contrôle et réaliser des fonctions assumées normalement par des zones subcorticales est une erreur impardonnable. Et c’est particulièrement frappant avec les enfants ayant des dysfonctionnements cérébraux mêmes mineurs. « Tiens-toi tranquille » ne cessent-on de dire aux hyperactifs. « Concentre-toi » est le leitmotiv répété aux enfants TDA. Les enfants dyslexiques passent pour des feignants, les précoces pour des caractériels. Partout dans les thérapies rééducatives, on passe par le cortex frontal pour exiger de lui qu’il pallie aux dysfonctionnements subcorticaux. Ces stratégies sont vouées à l’échec et ne font que désespérer les enfants et les culpabiliser.

Devant l’état de Lucie, l’inefficacité des interventions conventionnelles et le peu de progrès dans son développement global, je finis par chercher des approches thérapeutiques qui me proposent une autre alternative, des approches qui tentent de stimuler le cerveau et non de lutter sur les symptômes. Des approches qui stimulent Lucie et ne la réduisent pas à un corps passif neurovégétatif. Des approches fondées sur la rééducation du mouvement fonctionnel et non sur des mobilisations ou des étirements passifs.

Dans un premier temps, je me forme à partir de 2005 à la méthode Padovan, en réorganisation neurofonctionnelle. Puis, à partirde 2008, à la méthode Masgutova d’intégration neurosensorimotrice des Reflexes. Intégration tactile, neurostructure, intégration des mouvements archétypes, stimulation auditive, visuelle, rééducation des fonctions orales et intégration des réflexes primaires et archaïques. Il ne s’agit pas d’apprendre quoi que ce soit à Lucie. Il s’agit d’établir des connexions cérébrales à partir d’information qui font sens. Il s’agit d’informer le cerveau en stimulant le système nerveux périphérique et les paires crâniennes.

Je travaille avec ma fille une heure par jour, cinq jours par semaine, tous les matins. Elle adore les thérapies. Lucie se développe dès lors au-delà de toute attente, elle rencontre et dépasse les objectifs fixés annuellement et conjointement par les différents intervenants. Le diagnostic de cécité corticale est abandonné, celui de déficience intellectuelle profonde remis en question. Lucie entre dans la même école que Pierre en maternelle, elle sera ensuite scolarisée à la maison durant deux ans. Elle apprend à lire, à pointer des mots, des lettres, des chiffres. Elle apprend l’anglais par immersion, elle se révèle surdouée en mathématiques et démontre qu’elle dispose d’une mémoire exceptionnelle et photographique. Elle communique par quelques mots pour exprimer ses besoins essentiels et fait l’apprentissage de la propreté. Elle n’est jamais malade, elle mange bien, dort bien, elle est très agréable, elle développe des habiletés sociales remarquables.

Les approches utilisées ont permis d’obtenir de bons résultats pour son développement global. Elles n’ont pas mis fin à la spasticité. Les mesures effectuées par les médecins ont cependant montré une amélioration significative au niveau des membres supérieurs, un meilleur tonus axial et le maintien des amplitudes articulaires avec de légères améliorations du flexum des genoux comme de la mobilité de la cheville. « L’évolution de Lucie est quand même exceptionnelle compte tenu de l’atteinte sévère qu’elle présente » dira en 2011 le Physiatre qui la suit à Montréal pratiquement depuis la naissance. Malgré sa luxation de hanche, Lucie ne développera jamais de scoliose et ne présentera aucune douleur évaluation avant notre arrivée en France.

On a longtemps cru qu’une atteinte sur une zone ne pouvait pas être réparée. En fait, le principe de plasticité montre que les informations localisées dans une zone, peuvent se délocaliser, se relocaliser. Si une voie neurologique est atteinte, une nouvelle voie peut se construire. Il suffit pour cela de l’informer. Tout est information au niveau du cerveau. Tout est interconnexion. Le tout et la partie sont intrinsèquement reliés. Rien n’est jamais joué une fois pour toute. Pour réparer le cerveau, il suffit de communiquer avec lui. Et pour cela, il faut passer par le corps, il faut utiliser l’ensemble du système nerveux et non pas seulement le lobe frontal.

Pour Norman Doidge, il ne fait aucun doute que toute rééducation cérébrale doit nécessairement commencer par le système nerveux autonome et notamment travailler sur le nerf vagal. Un neurologue anglais a utilisé la métaphore du feu de circulation pour définir les trois états fondamentaux du cerveau.

Le feu rouge : Dans une situation de danger, le cerveau bloque les fonctions digestives, la respiration, les battements cardiaques et fige le corps. C’est le réflexe de paralysie par la peur. On peut mourir de peur. C’est l’état des enfants atteints de paralysie cérébrale comme Lucie qui finissent recroquevillés sur eux-mêmes, les muscles tétanisés, les fonctions respiratoires, digestives et cardiaques dysfonctionnelles.

Le feu orange : Dans un environnement inconnu et potentiellement dangereux, le cerveau est en état de vigilance : il prépare le corps à fuir ou à se battre. Le système nerveux somatique est sollicité, les battements cardiaques et la respiration s’accélèrent, le système digestif est bloqué, les glandes surrénales suractivées pour produire de l’adrénaline et du cortisol. C’est l’état des enfants hyperactifs.

Le feu vert : dans un univers sécuritaire, le cerveau est détendu. La digestion s’effectue normalement, la respiration est profonde et lente, les battements cardiaques sont réguliers et lents. Le système musculaire est détendu, sauf les muscles du visage car c’est l’état idéal des apprentissages et de la communication. C’est dans cet état qu’on voudrait voir tous les enfants en classe.

Toute thérapie doit veiller à ne pas activer le système sympathique, mais permettre à l’enfant de passer en mode parasympathique. Nous savons aujourd’hui l’importance de la sérotonine et de la dopamine pour l’établissement de nouvelles connexions cérébrales. Au contraire, les hormones de stress nous empêchent de communiquer avec le cerveau qui active des réflexes de protection. Dans toutes mes thérapies, je commence par des exercices respiratoires et une détente musculaire, ainsi je sollicite le système parasympathique et désactive le système sympathique. Même les enfants hyperactifs finissent par s’endormir en thérapie dès lors qu’une relation de confiance s’instaure entre moi et eux et que le cerveau se sait en sécurité. Je ne travaille jamais avec les enfants sur le cortex frontal, avec leur volonté et n’exige aucun contrôle cortical, mais bien le contraire. Il est préférable que les enfants dorment et déconnectent le cortex. Ainsi la communication avec les zones subcorticales est directe.

La plupart des approches qui activent la plasticité cérébrale font appel à la stimulation sensorielle, Doidge en recense un certain nombre dans son livre qui font l’objet de recherches et de publications scientifiques. Travail sur la langue (PoNS), sur l’audition (Tomatis), sur la vision (EMDR), intégration tactile et stimulation vestibulaire etc… Toutes ont un impact positif sur l’engrammation de nouvelles informations et sur les connexions neurologiques. Le gros problème selon moi, est que beaucoup de ses approches sont unilatérales. Elles ne sollicitent qu’un seul sens.

Dans mon travail, je sollicite toutes les paires crâniennes, à commencer par le nerf vague. En effet, l’ensemble des paires crâniennes nous donnent un accès direct à l’encéphale et permettent de « l’allumer ». Sonia Padovan expliquait que deux séances de Padovan par semaine parvenaient au même résultat que la méthode du patterning10 dont elle reprenait les patrons moteurs et qui doit être appliquée en boucle jusqu’à 8 heures par jour. Ce succès et ce gain, elle les expliquait par la stimulation orale centrale dans sa méthode qu’on ne retrouve pas dans le patterning qui est une méthode d’activation du SNS seulement. L’activation du cerveau par la stimulation de la bouche permet une meilleure intégration des patrons moteurs. C’est aussi à cette conclusion que parviennent les Américains qui font des recherches sur la stimulation électrique de la langue (méthode PoNS).

Padovan travaille sur la succion, la mastication, la déglutition et la respiration. Toutes ses fonctions se trouvent gravement endommagées en paralysie cérébrale et ne sont pas rééduquées. On les contourne, en particulier par l’alimentation entérale11.

La rééducation des réflexes par la méthode Masgutova est décrite dans la littérature comme le chainon manquant de la rééducation fonctionnelle. Je n’y reviendrai pas ici. Elle a apporté des bénéfices très importants à Lucie et j’en ai abondamment parlé dans des conférences antérieures que j’ai publiées également sur mon site internet. La toute première conférence que j’ai donnée en France là-dessus a eu lieu à l’école de Lucie. Une kinésithérapeute qui y a assisté est venue me voir ensuite pour me dire que durant sa formation on n’a jamais cessé de lui répéter qu’il ne fallait surtout pas stimuler les réflexes archaïques. Là encore, il s’agit d’une incompréhension du fonctionnement cérébral. Les réflexes archaïques ne sont pas archaïques, au sens où ils ne sont pas une survivance inutile d’un état primitif du cerveau. On conçoit en effet le cerveau comme une sorte de poupée russe avec des zones internes primitives, le cerveau reptilien, entourées par des zones plus développées, jusqu’au cortex qui est la partie la plus sophistiquée du cerveau humain, siège des fonctions avancées et siège de la conscience, objet de toute l’attention…

Dans les faits, Padovan expliquait que l’ontogénèse suivait la phylogénèse et donc que le cerveau humain repassait par tous les stades du développement des espèces. Le petit humain est d’abord unicellulaire, et se construit par multiplication et différentiation cellulaire, un peu comme une plante qui germe. Dans le placenta, l’embryon n’est guère plus qu’un poisson. Après la naissance, il va apprendre à bouger, ramper comme un reptile, puis se mettre à quatre pattes comme un mammifère, puis debout et finalement marcher en marche croisée… Cette description est évidemment grossière mais reste cohérente avec le développement cérébral qui doit intégrer des fonctions simples pour ensuite coordonner des fonctions complexes. Pour Masgutova, les réflexes infantiles sont une étape fondamentale du développement cérébral, elles ne « disparaissent » pas, elles s’intègrent et préparent le mouvement volontaire parce qu’elle permette d’établir les connexions cérébrales fondamentales qui vont servir la motricité volontaire. Par contre, quand une kiné active le système sympathique et déclenche les réflexes de protection d’un enfant, elle commet l’irréparable : elle fige l’enfant en paralysie par la peur ou provoque la lutte ou la fuite.

3.2 La Médecine énergétique

Les approches énergétiques font leur apparition depuis quelques années dans le domaine de la rééducation cérébrale. La physique quantique a permis le développement des lasers et on les utilise largement dans la technologie médicale. Aux Etats-Unis aujourd’hui, on s’intéresse vivement aux effets de la lumière sur la santé et on teste les effets de stimulation par lasers froids. Une technique que j’utilise aujourd’hui (QRI, Quantun Reflex Integration). Les recherches démontrent que les lasers et différents LED permettent d’activer les mitochondries et favorisent donc la production énergétique des cellules. Plusieurs techniques ont été validées scientifiquement au cours des dernières années donnant de meilleurs résultats que la kinésithérapie, plus rapidement et à moindre coût comme le massage, l’acupuncture et la stimulation nerveuse transélectrique (TENS).

La physique quantique ne fait pas son apparition en médecine qu’à travers la technologie. Il existe depuis toujours des magnétiseurs, des gens qui ont un « don » et peuvent soulager des douleurs, des dysfonctionnements par l’apposition des mains. Le fait que les miracles attribués à Jésus soient obtenus par imposition des mains explique pour une très grande part les réticences de la médecine scientifique à accepter ce type de pratique dite magique. On reconnait pourtant aujourd’hui l’utilité des « coupeurs de feu » pour limiter les dommages de la radiothérapie.

Les magnétiseurs ne travaillent pas sur la matière mais sur l’énergie et les progrès de la physique quantique nous permettent aujourd’hui de mieux comprendre qu’il n’y a rien de magique là-dedans. La matière n’est pas de la matière, elle n’est rien d’autre que de l’énergie, et l’énergie n’est pas une chose mais une activité. Et de ce fait, pour la physique quantique le monde entier est animé par une danse perpétuelle de l’énergie. Le monde est Un et tout est inter-relié.

Cette vision du monde n’est pas nouvelle. Elle est nouvelle pour la science moderne qui la redécouvre car en fait, elle est aux fondements mêmes des philosophies antiques, en particulier asiatiques. Fritjof Capra, physicien américain, publie en 1975 The Tao of Physics (Le Tao de la physique, 1985 pour la traduction française) dans lequel il souligne les profondes similitudes entre les philosophies orientales et la vision du monde qui se dégage de la physique quantique. Cet ouvrage m’a profondément impressionnée quand j’enseignais l’histoire des sciences à l’université mais c’est seulement à travers ma formation en Médecine Traditionnelle chinoise que j’en comprends toute la profondeur et les implications.

3.3 Les paradoxes de la physique quantique

La physique quantique constitue une nouvelle révolution paradigmatique et nous impose de réviser nos croyances scientifiques.

Einstein dans un premier temps montre que la physique de Newton est approximative. Il ne la remet pas fondamentalement en question car à notre échelle, les lois de la physique restent valables. Mais à l’échelle du cosmos, les notions de temps et d’espace ne sont pas aussi simples qu’on aurait voulu le croire. Par la théorie de la relativité, Einstein démontre que le concept d’espace en trois dimensions et d’un concept de temps comme entité séparée n’est pas recevable. Temps et espace sont inter-reliés dans un continuum à quatre dimensions l’Espace-temps. De plus, dans ce continuum, la matière n’est plus de la matière comme nous la concevons. E=mc², la masse n’est pas autre chose qu’une forme d’énergie.

La voie est ouverte à la physique des particules élémentaires qui elle, va bousculer profondément la physique mécanique et remettre en question finalement le socle même sur lequel toute la science moderne est établie.

Pour David Bohn, on ne peut plus considérer le monde comme constituée par des parties existant séparément et indépendamment les unes des autres. L’idée de particule élémentaire est fausse. « Nous dirons plutôt que l’interconnexion quantique de l’univers dans son ensemble est la réalité fondamentale » (cité par Fritjo Capra, La Physique du Tao : 141) Selon Niels Bohr « des particules matérielles, isolées sont des abstractions, leurs propriétés n’étant définissables et observables qu’à travers leurs interactions avec les autres systèmes » (La physique atomique et la description de la nature : 57).

Le monde n’est pas composé d’objets solides intrinsèquement reliés par des lois naturelles causales. Les particules élémentaires nous font prendre conscience que tout est lié dans un univers qui ne connait pas de phénomènes isolés mais seulement des probabilités de phénomènes, des possibilités d’interconnexion. Ce que comprend dès lors le physicien, c’est l’unicité de l’univers où tout est inter-relié, où rien n’est indépendant. Ce qu’elle nous apprend, c’est l’unité du monde et son équilibre profond.

De ce fait, on ne peut plus séparer l’observateur de ce qui est expérimenté. C’est la position de l’observateur et les conditions d’expérimentation qui vont conditionner les résultats. Il n’y a plus moyen de faire comme si la science était objective. Le sujet et l’objet sont intrinsèquement liés.

Plusieurs paradoxes sont soulevés par la physique quantique qui dépasse l’entendement cartésien. Ce sont les questions d’intrication, de superposition d’état et d’interférence.

Le phénomène de l’intrication : est un phénomène dans lequel deux ou plusieurs particules sont liées et présentent des états quantiques dépendant l’un de l’autre quelle que soit la distance qui les sépare. La démonstration d’Orsay démontre que deux particules quantiques adoptent des comportements simultanés, ce que décide l’une a une incidence immédiate sur l’autre et cela sans qu’elles puissent communiquer. s expériences menées en Suisse et en Italie, tendent à démontrer que l’information entre les particules intriquées « ne circule pas », même si l’on considère des vitesses 100 000 fois supérieures à la vitesse de la lumière.

La superposition d’état : La position et la vitesse d’un corpuscule en physique classique en mouvement ont en tout temps une existence assurée, ce qui permet de lui attribuer une trajectoire. Ce ne peut être le cas de la particule quantique. Lorsque l’on envisage un état quantique associé à une particule, on ne peut se référer simultanément à sa position et à sa trajectoire, sous peine de s’exposer à des contradictions. Ainsi une particule élémentaire ne possède pas simultanément une position et une quantité de mouvement bien définies (François Rothen, Au limites de la physique : les paradoxes quantiques : 131-132). Il n’existe en physique quantique que des probabilités qu’une particule soit dans tel ou tel état. Dans les faits, sans observation, la particule est dans tous les états possibles, les potentialités ne disparaissent que lorsque la particule est observée ou qu’on fait une mesure.

C’est le célèbre paradoxe du chat de Schrödinger : On enferme un chat dans une boite avec un détecteur de radioactivité qui casse une fiole de poison dès qu’il détecte la présence d’une particule radioactive. La probabilité que cela arrive dans un temps d’une minute est de 50/50. La situation du chat est intrinsèquement reliée à la situation des particules radioactives, or en physique quantique, celles-ci sont par définition à la fois et en même temps dans tous les états. Par conséquent, le chat est à la fois mort et vivant dans la boite. C’est le fait d’ouvrir la boite qui fait basculer la réalité dans une situation ou l’autre. Mais tant que l’observateur n’interfère pas le chat est à la fois vivant et mort.12

Principe d’Interférence : Lorsqu’on projette une particule sur un écran doté de deux ouvertures, la particule passe soit par l’une des fentes, soit par les deux… Tout dépend de l’observateur. Si celui-ci observe la trajectoire pour déterminer par quel trou la particule passe, alors tout se passe comme si elle ne passait que par un seul trou, mais s’il n’observe pas la trajectoire, mais seulement ce qui se passe après que la particule ait traversée la paroi, alors il voit des interférences qui impliquent que la particule soit passée par les deux trous à la fois, ce qui est impossible pour la raison.

Les physiciens ont été les premiers à dire que les paradoxes de la physique quantique n’avaient aucune incidence sur notre monde à nous. A notre échelle, nous pouvons toujours faire comme si la physique quantique ne remettait rien en question.

C’est pourtant de moins en moins possible. Les réflexions de la physique quantique commencent à faire tâche. Elles touchent désormais aussi la chimie et la biologie. Elles commencent à envahir la médecine. Les recherches sur l’ADN en particulier montre qu’au niveau moléculaire aussi il existe des paradoxes quantiques. Nous sommes en face d’une nouvelle révolution scientifique qui impose de nouveaux paradigmes, de nouvelles façons de penser et de concevoir le monde. Le monde n’est pas un objet, ni un ensemble d’objets. La danse cosmique de l’univers au niveau macroscopique comme au niveau microscopique nous invite à repenser le vivant et par conséquent à repenser notre place dans le monde comme notre rapport à ce monde.

La révolution paradigmatique qui est en cours me semble inévitable et remet en question nos croyances sur la science, et surtout, elle tend à démontrer que la science loin de nous donner un savoir sûr n’est rien d’autre qu’une croyance, une vision du monde qui instaure, comme le disait Thomas Khun un consensus. Le consensus est désormais très ébranlé.

En fait à mes yeux, la philosophie taoïste va plus loin que la physique quantique et ouvre des pistes de réflexion qui permettent de régler les paradoxes de la physique quantique. Pour les taoïstes, il n’existe qu’une seule substance unique mais cette substance prend plusieurs formes : elle est matière, énergie et esprit. C’est ce qu’on appelle les Trois trésors San Bao : Jing Qi Shen.

On utilise le concept de Qi en fait pour parler de la substance unique et le terme n’a pas de véritable traduction, le concept d’énergie est commode, surtout parce qu’il permet effectivement de tracer un pont entre la physique quantique et la philosophie taoïste. Dans sa forme la plus condensée, le Qi est matière, comme la glace. Dans sa forme la plus pure, il est esprit, comme la vapeur. Dans sa forme intermédiaire, il est énergie, c’est-à-dire quelque chose qui n’est ni solide, ni éthérée, mais principe actif. Il n’est pas innocent que ce soit le même terme Qi qui désigne la substance fondamentale du monde et la forme intermédiaire de la substance.

La conception taoïste du monde permet de poser des hypothèses que la physique quantique commence seulement à envisager. Pour cette dernière, il ne fait aucun doute que matière et énergie ne sont que les deux manifestations d’une seule et même réalité du monde. Mais elle oublie l’esprit.

Si une particule peut prendre plusieurs chemins à la fois, cela n’est pas concevable ni pour la matière, ni pour l’énergie. Mais l’esprit lui peut faire simultanément deux trajets. Et lui seul peut le faire. Il est même très facile d’en faire l’expérience. Il suffit de regarder un objet lointain et d’imaginer, par l’esprit, qu’on prend deux chemins simultanément pour y parvenir. Vous pouvez le faire et vous n’en deviendrez pas fou pour autant, et votre esprit sera toujours le même avant, pendant et après la projection. C’est exactement ce qui se passe dans le cerveau, une information prend simultanément plusieurs chemins et active un nombre incalculable de neurones simultanément. Une connexion cérébrale entre deux ou plusieurs neurones s’établit si les neurones en question vibrent simultanément et sur une même fréquence peu importe la distance, c’est une corrélation quantique.

En physique aujourd’hui, on commence à explorer le concept d’information. Mais celui-ci est insuffisant car on ne peut pas penser véritablement l’information en dehors de la communication qui suppose un déplacement, un trajet, une vitesse. On commence à supposer que l’esprit fonctionne de façon quantique, qu’il est capable d’envisager une multitude de possibilités mais que le choix qu’il opère les élimine toute sauf une, l’option choisie. Lorsque nous choisissons quelque chose, nous éliminons de notre réalité toutes les autres potentialités. Notre pensée est donc quantique comme le chat de Schrödinger…

En faisant intervenir le concept d’esprit, nous pouvons aussi régler le paradoxe de l’intrication des particules. Si deux particules participent du même esprit, elles n’ont plus besoin de communiquer à distance pour agir de façon cohérente l’une avec l’autre, elles sont corrélées parce qu’elles participent du même esprit.13

La médecine chinoise est une approche globale et intégrée. Elle conçoit l’être humain comme un tout et elle intervient aussi bien sur la matière (massage Tuina) que sur l’énergie (acupuncture) ou sur l’esprit (Qi Gong). Le diagnostic différentiel fait intervenir un long processus d’évaluation qui tient compte des trois dimensions. Elle ne s’intéresse pas du tout à des symptômes isolés, mais seulement à l’ensemble des dysfonctionnements dans leur globalité. Elles sont conscientes du tout, de l’unicité du corps humain et du fait qu’un problème quelque part a des incidences sur l’ensemble.

Le grand apport de la Médecine chinoise dans mon travail de rééducation, c’est évidement son aspect global, mais surtout ce qu’elle me permet de faire au niveau du système nerveux autonome. Toute ma formation aux Etats-Unis et au Canada a porté sur le système nerveux périphérique somatique. Ce n’est qu’à mon arrivée en France que j’ai commencé à appréhender toute l’importance du système nerveux autonome. C’est à mes yeux le maillon faible des rééducations quelles qu’elles soient, alternatives ou conventionnelles. C’est assurément aujourd’hui la clé qui explique le succès de mon travail et ses résultats.

A force de travailler et de réfléchir, j’en suis venu à penser que pour un enfant, c’est là et pas ailleurs que tout se joue au départ (voir mon article Tout se joue avant trois ans). La première chose à laquelle nous devons veiller pour que le système nerveux central soit sain et se développe dans les meilleures conditions, c’est que nos bébés soient bien nourris, qu’ils mangent, digèrent comme il faut. Tout se joue au niveau du sang : il doit être oxygéné, fluide et riche en micros-éléments. Les fonctions cardiaques, pulmonaires et digestives doivent être adéquates. Pour que le cerveau se développe, il faut que les microglies fassent leur travail et pas seulement les neurones. Les microglies ne sont pas des sous-cellules, inférieures et indignes d’intérêt. Elles assurent le bon fonctionnement des neurones, les nourrissent, font le ménage des déchets, fabriquent le liquide céphalo-rachidien et fabriquent la gaine de myéline. L’essentiel de leur action se fait durant le sommeil. Un bébé doit donc manger, digérer et dormir pour aller bien.

Nous accordons aujourd’hui une plus grande importance au fonctionnement de ce deuxième cerveau qu’est l’intestin. Car celui-ci comporte lui aussi des neurones. Mais il y en a aussi dans le coeur. Il existe donc trois cerveaux et non deux. De la même façon, il y a trois « foyers » en médecine chinoise, le foyer supérieur, la tête, le foyer médian, la poitrine, et le foyer inférieur, l’abdomen. La bonne santé dépend du fonctionnement harmonieux des trois foyers.

A mon sens on ne peut rien comprendre au fonctionnement cérébral si on ne tient pas compte de la globalité du corps, si on ne cherche pas les dysfonctionnements ailleurs que dans le cerveau. On ne comprend rien à l’épilepsie car on en cherche les causes dans le cerveau luimême. En Médecine chinoise, l’épilepsie est due à un dysfonctionnement organique, on la traite non pas dans le cerveau, mais en amont dans les dysfonctionnements physiologiques du système nerveux périphérique.

Le bon fonctionnement du système autonome est indispensable au bon fonctionnement du cerveau. C’est même la base fondamentale. Par expérience, j’ai pu constater que le système nerveux somatique, la matière elle-même répondait mieux à la stimulation énergétique qu’à la stimulation mécanique. Faire circuler l’énergie dans les méridiens énergétiques a une profonde influence sur l’information et l’activation musculaire. Un blocage énergétique d’un méridien a un impact sur la matière qui se trouve sur son trajet.

En activant simplement la circulation énergétique, j’ai pu déclencher des réflexes qui restaient bloqués sur le plan mécanique et que la rééducation somatique ne me permettait pas de régler. Quand un enfant dort sur la table, la stimulation d’un seul point peut provoquer des réactions somatiques dans tout le corps ou à distance. Si je prends par exemple un point de la tête sur le méridien de la vésicule biliaire, je peux déclencher des réactions aussi bien dans les jambes ou les pieds (trajet du méridien) que dans les mains (impact sur les autres méridiens).

L’exemple le plus probant et le plus impressionnant des potentialités de la Médecine chinoise c’est la guérison de l’épilepsie de Lucie. Lorsque nous sommes arrivées en France et que Lucie a repris des thérapies conventionnelles, elle a connu un nouvel épisode de stress majeur qui a eu d’importantes conséquences sur sa spasticité, son sommeil et ses comportements, mais aussi sur l’épilepsie. Elle a commencé à faire des crises tonico-cloniques diurnes hebdomadaires. Sur les conseils de mes enseignants en Médecine chinoise, j’ai mis en place, en accord avec la neurologue, un traitement en phytothérapie chinoise. Elle me donnait un mois pour régler le problème. Ce qui fut fait. Lucie n’a plus fait de crises pendant 3 mois, ce qui correspond aussi aux vacances scolaires, mais quand Lucie reprend la kinésithérapie à la rentrée scolaire, les crises réapparaissent à partir de novembre et s’intensifient pour redevenir hebdomadaires.

C’est tout à fait par « hasard » que je trouve la solution. Je travaille à cette époque sur les méridiens extraordinaires et découvre le fonctionnement du Qiao Mai (Yin Qiao Mai et Yang Qiao Mai, méridiens yin et yang du talon) qui relient les malléoles interne et externe de la cheville aux yeux. L’énergie circule dans le méridien yin la nuit et contribue au sommeil, elle circule dans le méridien yang le jour et le passage du yin dans le yang provoque le réveil. Le trajet des méridiens passe à l’interne par la nuque et le cerveau et plusieurs points sont connus pour avoir une action sur l’épilepsie. C’est pour moi une révélation car je comprends enfin tout un ensemble de problèmes de Lucie, mais surtout trouve une explication possible aux crises tonico-cloniques du réveil qui caractérisent l’épilepsie de Lucie. Je travaille sur trois points fondamentaux aux deux extrémités des méridiens : les points V62 sur la malléole externe, Rn6 sur la malléole interne et les points V1 au bord du canthus interne des yeux. Eureka, en quelques jours les myoclonies disparaissent. C’est leur aggravation en violence qui manifestement provoquent des crises tonico-cloniques diurnes. Dans le mois qui suit, Lucie fera encore deux petites crises tonico-cloniques de respectivement 90s et 60s. Ensuite plus rien. Quand j’ai discuté avec le médecin de l’école de Lucie de mon désir de traiter l’épilepsie par la Médecine chinoise traditionnelle en 2014, il s’est écrié que mes pratiques étaient douteuses et bien loin de l’Evidence-base-Medecine. Pourtant, c’est bien la Médecine chinoise qui a guéri Lucie de son épilepsie, cela en moins d’un mois avec 3 points d’acupuncture…

Ce travail ne peut pas être validé scientifiquement. Il ne peut pas être reproduit sur d’autres enfants épileptiques. Chaque cas est unique. Pour moi, mon travail tient plus à l’art qu’à la science, relève davantage de l’intuition que du savoir. Nous disposons aujourd’hui de traduction de publications faites dans les hôpitaux chinois qui quantifient les résultats obtenus par traitements d’acupuncture et présentent des protocoles ainsi que leurs résultats. Nul doute que la place prépondérante de la Chine dans l’économie mondiale ne facilite à l’avenir les échanges de connaissances et une meilleure compréhension de cette médecine ancestrale dont les fondements sont très très éloignés de notre conception du monde, de l’homme et de la santé.

La Médecine chinoise traditionnelle constitue à mes yeux l’approche la plus cohérente avec la révolution scientifique introduite par la physique quantique. Intervenir sur la matière, sur la forme la plus condensée de la substance, est la tâche la plus difficile et la plus agressive car on ne transforme pas la matière facilement. Intervenir sur l’esprit est la tâche du Zhi Neng Qi Gong. Cela suppose un long entrainement et la capacité de communiquer au cerveau de nouvelles informations, de changer son état. La guérison par le Zhi neng Qi Gong est un fait bien établi en Chine, c’est un art et seuls les maîtres de cet art y réussissent. Pour ma part, je travaille surtout sur l’énergie parce que c’est à ce niveau que le travail est le plus facile, le plus simple et le plus accessible. Le Qi est changeant, mobile, fluide et intervenir pour le débloquer et le faire circuler est à la portée de chacun. Même un enfant peut le faire sur lui-même. Il permet d’atteindre des résultats rapides et surprenants. Les troubles du sommeil, du langage, du comportement ou de l’attention disparaissent, les dyslexiques cessent de l’être, les précoces deviennent sereins, les hyperactifs se calment.

Je ne fais pas de miracle, je vois les enfants une fois par mois pour des séances de trois heures et il faut souvent entre 10 et 15 séances pour voir les difficultés disparaître. Et les résultats tiennent manifestement sur le long terme14.

C’est évidemment beaucoup plus long si les atteintes cérébrales sont graves et je n’ai pas réponse à tout. J’obtiens des améliorations notables avec les autistes et les enfants atteints de paralysie cérébrales. Je ne règle pas toujours les problèmes d’épilepsie mais parvient à atténuer les symptômes en fréquence, en intensité et on note des améliorations importantes dans la récupération post-crise. Les transformations sont notées par les parents, les enseignants, par les thérapeutes conventionnelles qui sont étonnées par les progrès des enfants qu’elles suivent en parallèle et parfois même par les neurologues, souvent sceptiques face à mon approche. Tout comme Lucie, de jeunes enfants que je traite qui sont atteints de paralysie cérébrale grave se développent et progressent de façon inattendue.

La plasticité cérébrale existe, mais si on veut rééduquer le cerveau, il faut harmoniser toutes les fonctions physiologiques et travailler sur l’ensemble du système nerveux et non sur des symptômes isolés. Il faut observer les enfants pour comprendre leur spécificité et adapter les stratégies thérapeutiques à chaque cas particulier. Il n’est pas question d’appliquer des règles toutes faites et établies une fois pour toute. J’utilise ce que j’ai appris et applique mes connaissances au cas par cas en adaptant mes interventions en fonction de ce que j’observe au moment où je l’observe. Il m’arrive souvent de partir sur une idée préconçue et changer de tactique parce que l’enfant lui-même par son attitude, ses positions, ses réactions demande un travail particulier. La clé essentielle de mon travail repose sur l’exigence d’être disponible, ouverte, observatrice, d’être en harmonie avec eux. Le travail énergétique est un travail de communion avant d’être un travail de communication. C’est aussi un travail d’humilité car ce sont les enfants qui savent et guident mes interventions et non le contraire.

 

 

1 Esprit Okima est fondé en 2018 par un médecin pour faire la promotion d’une vision intégrative et holistique de la santé. https://esprit-okima.fr

2 La métaphore de la caverne de Platon est incroyablement pertinente de nos jours. La très grande majorité d’entre nous vit rivée à un écran, pendant que d’autres, peu nombreux, tirent les ficelles du système mondial et agitent les figurines sur les murs. Et ne nous y trompons pas, c’est bien la technoscience qui nous empêche de voir que le soleil brille dehors.

3 Lucie reste en vision de survie et ne fait pas de focus sur les objets ou les gens qui l’entourent. Elle voit aujourd’hui encore « globalement ».

4 A ce sujet, voir l’excellent ouvrage de Thierry Hentsch, La croyance, premières réflexions, 2003.

5 La médecine moderne s’est développée grâce à la dissection des cadavres qui permet de mieux connaitre l’anatomie. Sur les champs de bataille, elle intervient sur des vivants, mais les soldats blessés ne sont que des cadavres en sursit tant qu’on n’aura pas découvert l’asepsie.

6 Angel Gomez Lopez, Sensibilisation des médecins généralistes aux dérives sectaires dans le domaine de la santé. Université Pierre et Marie Curie, 2014.

7 L’ostéopathie, née en Angleterre, a mis plus de vingt ans et encouru de nombreux procès avant d’être reconnue comme une approche légitime en France. La Médecine chinoise traditionnelle, vieille de 3000 ans, reconnue dans de nombreux pays, se bat également pour obtenir sa reconnaissance en France.

8 Aujourd’hui, le portage est recommandé pour les bébés prématurés. Le peau-à-peau leur permet de mieux se développer. On sait aussi que les bébés portés par leur mère, marchent plus vite et mieux que les enfants (Tout se joue avant trois ans, ou comment soutenir le développement cérébral des enfants).

9 voir Doidge.

10 Approche développée dans les années soixante par Doman et Delacato à Philadelphie.

11 Voir à cet égard l’ouvrage de Catherine Senez, Rééducation des troubles de l’oralité et de la déglutition. 2015.

12 Certains physiciens ont posé l’hypothèse d’univers parallèles. Ainsi dans une dimension le chat serait vivant et mort dans une autre… On envisage même que les trous noirs soient des portes entre les mondes, mais ceci est pour l’heure des hypothèses de la pensée.

13 Gregg Braden dans La divine matrice (2006) poursuit et complète la réflexion de Capra sur la physique quantique et les enseignements des grandes approches spiritualistes. La matrice n’est pas autre chose que « l’Esprit » du monde, ce qui relie toute chose en un seul tout.

14 Cela fait maintenant six ans que je travaille comme neurothérapeute, à ma connaissance les enfants traités continuent à aller bien des années plus tard. J’ai eu le cas d’une petite hyperactive de 8 ans qui a connu un retour des symptômes suite au décès de sa maman. Le papa m’a donc consultée de nouveau et j’ai refais avec elle trois nouvelles séances. Aux dernières nouvelles, elle va très bien.